Prérequis
Résumé
L'injectivité et la surjectivité sont des propriétés des fonctions très intéressantes. Dans une équation fonctionnelle, réussir à montrer que les solutions sont forcément injectives ou surjectives est souvent un grand pas dans la résolution de l'équation. Il est en effet possible d'utiliser ces propriétés de manière très efficace dans la suite du raisonnement.
Ce chapitre a été
écrit par P.-A. Jacqmin et
mis en ligne le 8 décembre 2014.
1. Injectivité
Supposons que lors de la résolution d'un problème, on tombe sur une équation du type $f(f(x))=f(2x)$. Il serait fort tentant de "simplifier les $f$" pour obtenir $f(x)=2x$ et finir ainsi le problème. Malheureusement, rien ne nous dit que $f(x)$ et $2x$ ne sont pas deux réels différents, envoyés sur la même valeur par $f$. Il ne nous est donc pas permis de supprimer les $f$, à moins que la fonction $f$ soit
injective :
Exemples :
- La fonction $f: \mathbb{R} \to \mathbb{R}: x \mapsto x^2$ n'est pas injective. En effet, $f(-1)=1=f(1)$ mais $-1 \neq 1$.
- La fonction $f: \mathbb{R} \to \mathbb{R}: x \mapsto 2x$ est injective. En effet, si $2x=2y$, alors $x=y$.
- La fonction $f: \mathbb{R}^+ \to \mathbb{R}^+: x \mapsto x^2$ est injective. En effet, si $x^2=y^2$ avec $x,y \in \mathbb{R}^+$, alors $x=y$.
Application aux équations fonctionnelles
Dans un problème concret, si on a l'impression que toutes les solutions sont injectives, on peut alors essayer de le prouver. Pour ce faire, on prend $a,a' \in A$ tels que $f(a)=f(a')$ et on essaye de prouver $a=a'$. Si on y parvient, alors cela signifiera que toutes les solutions de l'équation sont injectives, et on pourra alors par la suite "simplifier par $f$" si cela se révèle utile dans la suite du raisonnement.
Dans cet exemple, on peut montrer que $f$ doit être injective. En effet, en remplaçant $y$ par $1$, on obtient : $f(f(x)^2+1)=2x$. Maintenant, si $a,a' \in \mathbb{R}$ sont tels que $f(a)=f(a')$, alors $2a=f(f(a)^2+1)=f(f(a')^2+1)=2a'$. Donc $a=a'$ et $f$ est injective.
2. Surjectivité
Imaginons maintenant que, lors de la résolution d'une équation fonctionnelle, on obtienne l'équation $f(f(y))=2f(y)$ pour tout $y \in \mathbb{R}$. On pourrait se dire : "pour tout $x \in \mathbb{R}$, je prends un $y$ tel que $x=f(y)$ et j'obtiens $f(x)=2x$". Il suffirait alors de conclure. Malheureusement, rien ne nous garantit qu'un tel $y$ existe. Il faudrait en fait prouver que $f$ est surjective pour que le raisonnement soit valable :
Exemples :
- La fonction $f: \mathbb{R} \to \mathbb{R}: x \mapsto 2x$ est surjective. En effet, tout $x \in \mathbb{R}$ est l'image par $f$ d'un réel : $f(\frac{x}{2})=x$.
- La fonction $f: \mathbb{R} \to \mathbb{R}: x \mapsto x^2$ n'est pas surjective. En effet, il n'existe pas de réel $x$ tel que $f(x)=-1$.
- La fonction $f: \mathbb{Z} \to \mathbb{Z}: z \mapsto 2z$ n'est pas surjective. En effet, il n'existe pas d'entier $z$ tel que $f(z)=1$.
Application aux équations fonctionnelles
Dans un problème concret, la façon la plus courante de prouver que toutes les solutions sont surjectives est de parvenir à obtenir une expression du type $x = f(\ldots)$ pour tout $x \in B$. En effet, cela montrerait directement que tout élément de $B$ est effectivement dans l'image de $f$.
Posons $y=0$. Nous obtenons
$$f(x^2+f(0))=2x-f(0).$$ Maintenant, remplaçons $x$ par $\displaystyle\frac{x+f(0)}{2}$ dans cette équation de sorte à faire apparaître $x$ seul dans le membre de droite. Cela nous donne
$$f \left( \left( \frac{x+f(0)}{2} \right) ^2+f(0) \right)=x.$$ Dès lors, tout réel $x$ est dans l'image de $f$ et la fonction $f$ est surjective.
3. Bijectivité
Nous venons de voir que l'injectivité et la surjectivité d'une fonction peuvent grandement nous aider dans un problème. Rien de tel alors si la fonction est à la fois injective et surjective !
Exemples :
- $f: \mathbb{R} \to \mathbb{R}:x \mapsto 3x$ est bijective.
- $f: \mathbb{Z} \to \mathbb{Z}:z \mapsto 3z$ n'est pas bijective car elle n'est pas surjective.
- $f: \mathbb{Z} \to \mathbb{N}:z \mapsto |z|$ n'est pas bijective car elle n'est pas injective.
Si on reprend les définitions d'injectivité et de surjectivité, on se rend compte qu'une fonction est bijective si et seulement si pour tout $b \in B$, il existe un unique élément $a \in A$ tel que $f(a) = b$. On peut donc dans ce cas construire une fonction
inverse de $f$ qui va de $B$ dans $A$ et fait exactement "l'inverse de $f$" :
Lemme
Soit $f: A \to B$ une fonction. $f$ est bijective si et seulement s'il existe une fonction $f^{-1}: B \to A$ telle que $f^{-1}(f(a))=a$ pour tout $a \in A$ et $f(f^{-1}(b))=b$ pour tout $b \in B$. La fonction $f^{-1}$ s'appelle alors l'inverse de $f$.
Par exemple, l'inverse de la fonction $f: \mathbb{R} \to \mathbb{R}:x \mapsto 3x$ est $f^{-1}: \mathbb{R} \to \mathbb{R}:x \mapsto \frac{x}{3}$.